Love, Lies: Une tragédie, de l’amour et un peu de musique.



Amour ou amitié? Égoïsme ou altruisme? Sacrifice ou contentement ? Ce sont ces questions essentielles qui feront face à Jung So-yool (Han Hyo-joo) dans Love, Lies. Peut-on abandonner ses rêves, ce que l’on est pour le bonheur de quelqu’un d’autre? Peut-on vivre avec les choix, parfois cruels que l’on fait ? Et c’est l’esprit troublé, trahi, jaloux et en colère de cette héroïne atypique qui sera le fil conducteur de ce film touchant, triste et surtout humain.

Love, Lies était sur ma liste principalement pour une raison : Yoo Yeon-seok. La chair est faible je le sais, mais je ne regrette pas un instant d’y avoir posé les yeux. Je ne suis pas certaine que le film ait battu des records sur le marché national mais il vaut la peine d’être vu ne serait-ce que pour l’interprétation de Han Hyo-joo. Si j’ai eu quelques problèmes avec son de jeu d’actrice dans W , ici elle crève l’écran !

L’histoire s’ouvre sur une Corée sous occupation japonaise. Jung So-yool a une dizaine d’années, elle vit dans l’un des derniers gwonbeon, une école qui forme les futures gisaeng. Elle y est chapotée par San-wol (Jang Young-nam) et le manager des lieux (Lee Han-wi). C’est dans ce gwonbeon que So-yool va rencontrer Seo Yeon-hee (Chun Woo-hee), une petite fille du même âge qui vient d’être vendue par son père pour quelques sous. Les deux petites filles deviennent amies et vite inséparables. Elles grandissent dans la tradition des gisaeng sans se poser de questions sur leur avenir puisqu’il est déjà tout tracé. Mais le retour de Kim Yoon-woo (Yoo Yeon-seok) dans le pays va complètement chambouler les deux amies et remettre toute leur vie en question.


Kim Yoon-woo est un célèbre auteur, compositeur et producteur de musique populaire. On est loin du jeongga, la musique traditionnelle coréenne chantée par les gisaeng pour les classes huppées. Jung So-yool est amoureuse de Kim Yoon-woo et presque comme un secret, ils se promettent mariage et vie à deux. Si dans la foulée, l’auteur-compositeur pouvait lui écrire quelques chansons populaires, ça ne serait pas de refus ! Parce que oui Jung So-yool rêve secrètement de faire autre chose que gisaeng. Sa rencontre avec Lee Nan-young (Cha Ji-yeon), une célèbre chanteuse populaire dont Kim Yoon-woo a écrit et composé les airs les plus connus, vont finir de la persuader: elle veut être une chanteuse populaire, elle est faite pour ça ! Une magnifique carrière et une tendre vie amoureuse s’ouvre à elle. Sauf que le destin va en décider autrement.  


Des deux jeunes filles, c’est la voix claire de Yeon-hee qui va faire vibrer le cœur de Lee Nan-young. Cette dernière va non seulement réveiller le talent endormi de Yeon-hee mais aussi susciter en elle le désir d’embrasser cette carrière. C’est un déchirement pour So-yool, qui à partir de là devra faire avec le succès croissant et incontrôlable de sa meilleure amie. Kim Yoon-woo a aussi été emporté par le talent et la sensibilité de Yeon-hee, mais pas seulement. Il va tomber éperdument amoureux de cette « orpheline » à la voix d’ange qui sait mettre tellement de vie dans ses chansons. Elle parle au peuple (le bas peuple) et c’est exactement ce que Yoon-woo cherchait. Avec son talent et la voix de Yeon-hee, leur collaboration atteint des sommets en même temps que So-yool perd petit à petit pied. Sans se douter de l’histoire d’amour qui nait entre Yoon-woo et Yeon-hee, tente tant bien que mal de digérer la réalité mais la découverte de l’idylle va finir de l’achever et surtout va  réveiller ce qu’il y a de plus terrible en elle.


Elle change alors de look, cesse d’être une gisaeng et devient la maitresse de ce colonel japonais, joué par Park Sung-woong, à qui elle s’était refusée auparavant. Il a le pouvoir et c’est ce dont elle en a besoin. Pour satisfaire sa nouvelle maitresse, le colonel fait dépêcher un orchestre, les meilleurs auteurs et compositeurs pour créer un tube. Sauf que So-yool n’a pas le talent nécessaire et que le tube fait un flop monumental. Le talent ?  Ce n’est qu’un détail pour So-yool qui a d’autres atouts dans son sac. Pour commencer elle va faire interdire la diffusion de la chanson phare de Yeon-hee. Sans distribution, pas de couverture médiatique et sans couverture pas de succès. C’est ainsi que les japonais, sur demande de So-yool, prohibe le CD de Yeon-hee. C’est une catastrophe, non seulement pour la chanteuse mais aussi pour Kim Yoon-woo qui n’avait pas prévu ça. Ce dernier ivre de douleur s’en prend à des soldats japonais et se retrouve ni une, ni deux derrière les barreaux. Voilà Yeon-hee, seule sans amoureux, sans revenus, sans le sous et sans solution. Elle ne peut se tourner que vers une seule personne, celle en qui elle a confiance: son amie d’enfance, So-yool. Que va faire cette dernière face à cette amie qu’elle n’a pas hésité à trahir et à bafouer ? Sa jalousie et sa rancune vont-elles prendre le pas ou So-yool va-t-elle se raviser ?


Tout au long du film, je me suis demandée si, me sentant humiliée et trahie, comme So-yool a pu se sentir, j’en serais arrivée à de tels extrêmes? Je ne pense pas mais cela dit So-yool n’est pas un monstre sans nom. Il y a, chez elle, quelque chose de profondément humain, dans ses réactions, dans ses émotions. Elle n’a pas toujours été cette femme troublée, désemparée, perdue. L’enchainement des événements et l’accumulation l’ont poussés à la méchanceté voir à la cruauté. Avait-elle conscience des conséquences de ces actes ? C’est discutable. Elle reprenait, légitimement, ce qu’on lui avait usurpé et marchait désespérément vers ce rêve dont le monde s’obstinait à la priver. C’était à elle d’être populaire et adulée, à elle de recevoir l’amour indéfectible de Yoon-woo. Et puisque elle n’avait aucun des deux, elle n’a pas hésité à vendre son âme et son corps. Quel sacrifice ou quelle folie. So-yool est tellement prise dans sa toile et ses plans machiavéliques que même quand elle réussit à faire libérer Yoon-woo de prison, son seul souci c’est qu’il lui écrive de nouvelles chansons. Elle ne l’entend pas lui demander ce qu’est devenue Yeon-hee, elle ne l’entend pas lui cracher sa colère à la figure, elle ne voit même pas sa répugnance à la voir s’être donnée à l’envahisseur japonais. So-yool ne voit que son rêve et les moyens d’y arriver. Évidemment son acharnement finira par non seulement détruire la vie des gens autour d’elle mais aussi par la détruire elle-même. 

Une petite note pour le décor du film qui était splendide, réaliste et sublimé par une magnifique cinématographie. La caméra du directeur, Park Heung-shik (à qui l’on doit Memories of The Sword, un autre film à la cinématographie remarquable), a superbement capturé les couleurs et les lumières (les scènes de Jung So-yool en hanbok scintillants sont resplendissantes).  


Love, Lies est un mélodrame humain, torturé, inquiétant parce qu’il nous fait nous demander si nous sentant trahi, on serait capable de prendre des décisions si lourdes de conséquences. Ce n’est pas le film de la décennie, ni un chef d’œuvre d’originalité, mais c’est une histoire tragique d’amour, d’amitié, de trahison, de souffrance et de douleur qui vaut d’être mentionnée et vue. Ne serait-ce que pour le personnage tourmenté de Jung Yo-sool, jetez-y un œil. 


2 comments:

  1. Même sans lire ton article, les images donnent super envie. Ce film a l'air magnifique ! Et donc, parce que j'ai lu ton article aussi (bien entendu^^), lui aussi donne envie. Déjà parce que je suis très intéressée par la vie des gisaeng, la façon dont elles grandissent et tout, mais aussi parce qu'il y a l'air d'avoir là un drame humain prenant, avec en plus cette affaire de musique qui m'attire, vu que j'aime les films où ça chante, même un peu. Le seul souci va être de se mettre dans l'humeur, parce que ça n'a pas l'air bien gai comme histoire, mais je dois dire que je n'avais pas entendu parler de ce film, donc merci beaucoup pour la découverte :)

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  2. Je viens juste de terminer ce film, qui m'a agréablement surprise. Je n'avais aucune idée de l'histoire du film mais comme j'aime tout ce qui est historique et les deux acteurs (YYS/HHJ)je n'ai pas hésité. Je ne le regrette pas. Quel beau gâchis qd même! Deux vies brisées en un instant, et tout ça pourquoi? jalousie? trahison?
    Toutefois, c'est vrai plaisir pour les yeux (la luminosité, le décor, seoul des années 40,...) et les oreilles (les chansons et surtout la voix Yeon Hee).

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